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Par Hassan EL ARIF | Edition N°:5594 Le 17/09/2019 

Nouvelle mesure pour contrer les spécialistes de la spoliation foncière. Depuis le lundi 16 septembre, il n’est plus possible de demander une copie du certificat de propriété immobilière concernant une tierce personne à moins de disposer d’un mandat officiel à cet effet ou de relever des catégories professionnelles suivantes: notaires, avocats et adouls.

L’obtention dudit document est évidemment possible pour les propriétaires et les personnes détenant des droits réels dûment inscrits sur un titre foncier.

La mesure s’appliquera aussi bien aux certificats de propriété qu’aux copies des titres fonciers et de tout autre document déposé auprès de l’Agence de la conservation foncière. La consultation des titres fonciers concernant les tiers sera également proscrite sans procuration.

Sur le plan procédural, la demande de certificat de propriété doit obligatoirement être légalisée et accompagnée d’une copie de la carte d’identité sinon, le document est refusé.

 

La disposition a été prise par l’Agence de la conservation foncière dans le cadre des instructions royales au ministre de la Justice (30 décembre 2016) pour renforcer la lutte contre les spoliations foncières. Une réunion a eu lieu, hier lundi 16 septembre, entre l’Agence nationale de la conservation foncière et le ministère de la Justice pour arrêter les modalités d’application de la mesure.

La restriction suscite déjà le mécontentement des opérateurs exclus. «Nous avons évidemment besoin d’une copie d’un certificat de propriété pour établir un contrat de bail dans le cadre de la création de sociétés car il est exigé par l’administration fiscale. Nous avons également besoin d’une copie du certificat de propriété pour constater l’apport d’un terrain à une société. Avec le site de l’Agence, cette formalité est souple», explique Brahim Bahmad, président du Cercle des fiscalistes du Maroc.

Interrogé par L’Economiste, Karim Tajmouati, directeur de l’Agence de la conservation foncière confirme que «cette mesure a pour objectif d’intensifier la lutte contre les spoliations foncières. La philosophie derrière cette décision est qu’une personne intéressée par un bien n’a aucun souci à effectuer une demande de certificat de propriété dans la transparence en recourant à l’une des professions concernées ou en demandant une procuration».

Mécontentement des opérateurs exclus

Le resserrement des mesures autour de la sécurité des biens immeubles est monté d’un cran en août dernier à la faveur de la publication de la loi 31-10 au Bulletin officiel. Le texte introduit l’obligation d’inscrire toutes les procurations portant sur une propriété immobilière dans le registre national des procurations administré par les secrétaires-greffiers des tribunaux de première instance.

Selon Tajmouati, 99% des spoliations s’effectuaient par la voie des procurations. Depuis 2014, toutes celles n’ayant pas été authentifiées devant les personnes autorisées (adouls, avocats…) sont annulées.

Par ailleurs, les sociétés civiles immobilières (SCI) doivent être inscrites sur le registre national en plus du registre du commerce. De plus, dès qu’une société civile exerce des activités commerciales, elle doit obligatoirement changer de régime juridique.

Pour lutter contre les spoliations, l’Agence de la conservation foncière a institué un système d’alerte (Mohafadati) via l’envoi d’un SMS dès qu’il y a une tentative de modification d’un titre foncier. 25.000 personnes s’y inscrivent sur internet chaque mois.

Au moins 7.000 biens immeubles en déshérence

La question des spoliations immobilières a longtemps mobilisé l’attention publique tant au Maroc qu’à l’étranger. De nombreux propriétaires ont en effet été dépossédés de leurs biens. Les chiffres obtenus auprès de la direction générale de l’Agence nationale de la conservation foncière indiquent que plus de 7.000 biens immeubles en déshérence ont été identifiés. Il s’agit de propriétés appartenant à d’anciens colons, à des membres de la communauté juive émigrés… Le point commun entre ces biens est qu’aucune opération n’a été initiée depuis plusieurs années. Les critères de la déshérence ont d’ailleurs été arrêtés par la direction de l’Agence.